Écrire son histoire : pourquoi ?

J’ai très vite constaté que le désir d’écrire (ou de faire écrire) son histoire était un peu la “boule à facettes” de l’esprit. Ça brille, on ne peut pas l’ignorer, on a très envie de se lancer sur la piste de l’aventure, ça semble très festif… Mais en même temps on appréhende un peu (voire beaucoup) de creuser dans une histoire très fournie et d’en ouvrir les multiples tiroirs.

Pour être honnête, ni le biographe ni le narrateur ne connaissent d’emblée la teneur de chaque facette, ni de quelle manière elle s’assemble à ce tout. 

Ce Tout qui est une Vie, unique et singulière. L’aventure que nous partagerons sera unique et constituera un temps fort. Pour vous comme pour moi !

Voici quelques raisons de “passer à l’écrit”, avec exemples concrets d’aventures partagées avec des narratrices et narrateurs (anonymisés, cela va de soi). 

Retrouver et faire vivre la mémoire

La première motivation qui vient à l’esprit, et à juste titre, c’est de vouloir raconter notre histoire à nos descendants, et par là transmettre notre expérience de la vie. Une sorte de main tendue vers les générations futures


Au-delà de cette transmission, souvent s’immisce le besoin de justifier un parcours de vie qui nous a parfois échappé. Que l’on ait été trop absorbés par la vie professionnelle, ou au contraire que nos enfants nous “reprochent” notre manque d’ambition ou notre présence parfois trop pesante, on éprouve l’envie de dire simplement “j’ai fait de mon mieux et je vous aime”.

Une vie bien remplie, avec de nombreux rebondissements, déménagements, expatriations, remariage, suscite un besoin de “remise en ordre”, et ce sont souvent les enfants qui incitent une personne à raconter ce qu’ils ont du mal à cerner. Tout le monde y trouve son compte : le narrateur ou la narratrice trouve plaisir à faire plaisir et la revisite de l’existence n’est jamais anodine, elle réserve toujours des émotions inattendues. L’accompagnement est primordial.

Lorsqu’une personne ou une famille a connu un gros traumatisme, ou a souffert de non-dits, l’écriture est un recours inestimable pour remettre de la cohérence dans les pensées et apaiser les cœurs

Enfin, j’ai souvent été confrontée à la fin de vie, que parfois les personnes anticipent, parfois non. Dans les deux cas, il faut savoir se montrer réactive et proposer un accompagnement de qualité. Lorsqu’on parle à la fois de “fin de vie” et de “mémoire”, il est difficile de ne pas penser à la redoutée maladie d’Alzheimer. On serait tentés de croire que pour la personne qui en est atteinte “c’est trop tard”, elle ne pourra plus nous dire quoi que ce soit de sensé ou de juste historiquement. C’est une crainte bien légitime, mais pas totalement fondée.
J’ai accompagné plusieurs personnes souffrant de cette maladie dégénérative, et je peux affirmer qu’il n’est presque jamais trop tard. D’abord parce que la personne reste toujours présente émotionnellement, jusqu’à la toute fin de sa vie. Ainsi on peut travailler avec des supports, photos ou objets et on obtient parfois des résultats inattendus et émouvants. Ensuite, on n’a pas devant soi une non-personne qui dit “n’importe-quoi”, mais bel et bien un être humain qui, perdant son langage, en utilise un qui lui est propre.  Mais pour elle ça a un sens, et elle essaye toujours de communiquer ! A nous de nous adapter, dans la mesure du possible. Un peu comme on l’aurait fait avec un enfant qui s’approprie le langage et utilise un mot pour un autre. Le petit ne dit pas “n’importe-quoi”, il apprend. La personne alzheimer ne dit pas “n’importe-quoi”, elle désapprend.

Je me souviens d’une dame qui m’expliquait que “le goudron avait été lavé dans la rue”, ce qui me laissait perplexe. Jusqu’à ce que je comprenne que “le goudron” c’était le sol et “la rue” le couloir ! Et respectueusement je l’ai amenée à rire de cette méprise. Car le rire guérit autant que l’écrit, et il est très rare dans les structures de soins…

En conclusion : il n’est presque jamais “trop tard” pour assembler les pièces éparses du puzzle de la vie. Cela nécessite du temps, de la patience et de l’ingéniosité. J’ai tout cela, et je suis heureuse de l’offrir à mes narrateurs et narratrices.  

Jalon historique

Notre vie s’inscrit dans la grande histoire, et on n’en a pas conscience sur le moment. Pour ma part, j’adorais les histoires évoquant l’enfance de mes grand-parents ou de mes parents. J’étais notamment captivée par les témoignages, qu’il soient de vive voix, écrits ou photographiques, rapportant les “années folles”, et plus encore ce qui avait trait à la fin du XIXè siècle. J’avais vraiment l’impression que ces gens étaient très très vieux, et en même temps cette proximité avec une histoire lue dans les livres me donnait une sorte de vertige.

Aujourd’hui, lorsque je raconte à ma fille que j’ai appris à taper “aussi vite” sur une machine à écrire mécanique (what? mais qu’est-ce que c’est?), que j’ai connu les années Giscard puis les septennats Mitterrand, le minitel, le téléphone à cadran et les cabines téléphoniques à pièces… Je mesure que j’ai vécu une époque révolue et totalement dépaysante pour elle.

Parmis mes narrateurs et narratrices, j’ai la chance de voyager dans l’histoire du monde contemporain, et j’apprends autant que je donne.
Dernièrement j’ai revisité la guerre d’Indochine, et toutes ses conséquences humaines : perte d’identité et exil, montée de la dictature des khmers rouges et saccage d’un pays, deuils et traumatismes non guéris, éclatement de familles… 

Peu après, un narrateur m’a contactée par rapport à la guerre d’Algérie. Il en fait encore des cauchemars et il n’en peut plus. A 90 ans, il réalise avec douleur combien sa vie a pu être impactée par ce qu’il a vécu “là-bas”, et il veut que ses petits-enfants et arrière-petits-enfants sachent ce que signifie cette guerre, qui n’est pour eux qu’une série de dates dans l’histoire.

Enfin, le dernier projet qui me tient à cœur concerne l’histoire d’un migrant venu d’Afrique centrale “par la mer”. Entendez par-là qu’il a mis trois ans pour arriver en France… Son vécu est aussi instructif que poignant, et il balaie avec force et simplicité toute forme d’intolérance ou d’idée toute faite. 

Laisser un héritage à nos descendants

Notre histoire de vie est un patrimoine très précieux qui accompagnera les générations futures.

Je constate avec plaisir que de plus en plus de parents ou grands-parents se soucient désormais autant de transmettre leur patrimoine de cœur que leurs avoirs financiers.

J’aime particulièrement cette idée de “patrimoine”, dont les synonymes peuvent-être héritage, richesse, trésors… Ça en dit long ! 

L’héritage que vous pouvez transmettre par vos écrits est de l’ordre culturel, il raconte votre culture familiale et la replace dans son contexte. Si on approfondit cette notion de patrimoine culturel, on peut dire que c’est l’ensemble des biens (matériels et immatériels) qui constituent l’identité d’un être humain.  

Il ne nous viendrait pas à l’idée de brûler nos livrets de famille, ou nos papiers d’identité? D’ailleurs, lorsqu’on les a égarés on sait combien cela peut être compliqué ! Dans le même ordre d’idées on ne souhaite pas retirer à nos enfants une partie de leur identité ? C’est pourtant ce qui se produit lorsque des secrets de famille pèsent sur une lignée… Mon propos n’est pas de susciter un “grand déballage” générateur de conflits et de souffrances, mais plutôt d’apporter de la lumière sur des zones d’ombre. Et cette lumière permettra à nos descendants d’avancer sereinement dans une vie dont ils comprendront mieux les rouages et les subtilités. Et sans aller jusqu’aux situations d’omertas familiales, il est tout simplement plaisant et enrichissant de savoir d’où l’on vient, de quel terreau nous sommes issus. L’histoire, la grande comme la “petite”, est un socle sur lequel reposent notre présent et aussi notre futur, car nous y puisons des enseignements précieux, à reproduire ou à éviter.

Pour tout cela, il est important d’être accompagné. Par une personne professionnelle, rompue à la communication et dont la discrétion est garantie. Dans mon prochain article, vous découvrirez ma façon de procéder et mon éthique. 

D’ici-là prenez grand soin de vous, 

écrivez, lisez, rêvez, respirez…profitez !
À bientôt !

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